mercredi 12 janvier 2011

F LIN A.- Laisse moi entrer, John Ajvide Lindqvist, Télémaque, 2010

Note : Grrrrrrrr

L'histoire
Oskar est le mouton noir de sa classe, on le martyrise, on l'humilie, on le torture et lui n'ose rien dire. Rentré chez lui cet ado de 12 ans collectionne les coupures de presses de morts violentes, se nourrit de livre gores et se prend pour un tueur sanguinaire armé d'un couteau de boucher. Mais voilà qu'un garçon est retrouvé le cou tranché les pieds attachés dans un arbre et une cuvette en plastique sous lui ayant semble t'il servi à recueillir son sang. La frêle Eli vient d'emménager avec son père juste à côté de chez Oskar. Petit à petit une amitié se lie, indéfectible, ces deux âmes solitaires étaient nées pour se rencontrer. Mais Eli semble trop maigre, pas assez joyeuse et surtout trop étrange, puante, forte, aux traits changeants, trop adulte en paroles et surtout il y a son père, insignifiant, secret, sortant tard le soir. Les morts violentes se succèdent. Qui est vraiment Eli ?

Mon avis
Décidément deuxième livre de vampires que je lis ce mois qui renouvèle complètement le genre. Et ce n'est pas seulement un roman fantastique de base, c'est une sorte de biologie de la peur. En général on représente les gens qui ont peur dans les films d'horreur en train de hurler à sort-moi-tes-boyaux-tant-que-je-hurle, de se débattre, d'avoir des réactions insensées, mais nous savons tous, en tout cas ceux qui ont déjà vu la peur en face que cette dernière est silencieuse, froide et implacable. L'auteur nous présente les pires des situations imaginables ce qui, s'il n'avait pas de talent serait de la violence gratuite et obscène contre laquelle j'aurais été la première à tonner, mais grâce à sa pertinence des sentiments qu'il instile à ses personnages, il désamorce les bombes les unes après les autres avec l'aisance d'une HB qui aurait décidée de finalement vivre et laisser vivre. Le fait de l'âge des héros nous dédouane également des "lourdingues" histoires de pieu (et pas de pieux "comprenne qui peut" B. Lapointe) qui reviennent fatalement dans la navrante production de romans vampiriques actuelle, ce qui amène encore plus de synergie entre Eli et Oskar qui fabriquent peu à peu leur amour comme un puzzle (ah ben tient autre thématique du roman) et apprennent à apprivoiser leurs âmes, finalement liées et complémentaires l'une de l'autre pour former un tout cohérent.  En fait ils sont plus comme un Rubik's cube, mais je n'en dit pas plus pour ne pas gâcher le plaisir d'éventuels lecteurs.  D'après les critiques sur la quatrième de couv' Lindqvist serait une sorte de nouveau Stephen King, à quoi je réponds "non",  mais il me rappelle plutôt comme le dit "Death Ray" une sorte de Ray Bradbury amateur de Shakespeare sous acides. Là où l'auteur nous prend à contre-pied du genre pour lequel il écrit c'est que malgré l'horreur de cette sombre affaire et si l'on gratte un peu c'est une grande et belle fresque d'amour et de tolérance qui s'offre à nous. Comme le dit l'auteur lui même une sorte de Roméo et Juliette et croyez moi ici ce n'est pas galvaudé tant tout oppose Eli et Oskar dans tous les sens du terme.  Croc-méo et Julien aurait-on pu dire (oui je sais c'est naze).  Ce que j'ai beaucoup apprécié et que je n'avais pas lu depuis longtemps je m'en aperçois maintenant c'est l'apparition d'un narrateur omniscient qui n'hésite pas à intervenir ce qui relance toujours le suspens. Je cherche un défaut... ah oui!  j'en ai trouvé un, c'est la scène où Hakan "revient" après sa prise d'acide volontaire sur le visage et qu'il retrouve Eli... ça en revanche c'est de la violence gratuite qui déssert l'équilibre entre horreur et empathie que l'auteur avait patiemment tissé, pas de chance c'est dans la dernière partie du livre ce qui laisse un arrière gout de "Ouai bon ben on a compris"c'est trop et en plus c'est moins que moyen alors on aurait pu s'en passer et Lindqvist aurait pu nous le servir différemment. En revanche la fin est géniale et très bien trouvée. Voilà un roman que vous pouvez conseiller autour de vous. A lire sans oeillères en tout cas.
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